jeudi 28 octobre 2010

KABOOM



On a du mal à comprendre pourquoi Gregg Araki a voulu persister à réaliser un nouvel opus à sa trilogie de l'Apocalypse (Totaly Fucked Up/Doom Generation/Nowhere). Gregg Araki, la cinquantaine, tente de retrouver une jeunesse et une innocence définitivement perdue.


Toujours la même histoire d’un beau jeune homme naïf qui tombe brusquement dans l’absurdité du monde, sa folie et sa destruction. Pourquoi pas.  A partir de ce postulat il est toujours possible de partir autre part que vers Doom Generation ou Nowhere. Sauf que Greg Araki semble avoir perdu la main, son écriture patine et il esquisse un palimpseste inutile. On a la désagréable impression de voir un bonus du coffret dvd de sa trilogie culte. Kaboom est certes fournis en dialogues percutants, la direction ainsi que la plastique des acteurs est impeccable et forcement la direction artistique est à la hauteur d’un film de Greg Araki, mais cela ne suffit pas a en faire un film intéressant. Tout est prévisible, pas d'heureuse surprise. C’est un film sans accident. Après le très beau Mysterious Skin et le space cake de Smiley Face, Kaboom est une oeuvre régressive.  



A moins que…A moins que..Cela soit moi qui ai vieillis, plus exigeant, et rattrapé par un monde pas très fun, je sois moins perméable à la légèreté, à la déconne… Mais sa trilogie de l’Apocalypse était plus légère? Il me semble que Doom Generation et Nowhere (n’ayant pas vu Totally Fucked Up) ont sur décrire une certaine génération (une génération maintenant trentenaire) sans but, sans avenir, totalement capté par la société de consommation (pop culture, sex and drugs) attendant leurs morts en faisant la fête. Tout ça construisant un univers visuel cohérent où la fascination plastique (des corps, des plans) nous pousse à faire face à nos angoisses.  Bref un équivalent cinématographique aux histoires adolescentes conté par Bret Easton Ellis où le LSD remplace la cocaïne.



Est ce un hasard qu’Ellis revienne au même moment sur ces Zombis? Probablement pas. Araki et Ellis se retrouvent à singer leur jeunesse et leurs oeuvres sont aujourd’hui emprunt d’un certain cynisme. Mais peut être que ces deux auteurs pointent un aspect peu agréable, que l’on préférait ne pas voir. C’est à dire la description d’une autre jeunesse, celle du Xxie siècle, une jeunesse qui m'est étrangère, qui essaierait de reproduire l’existence chaotique des années 90 en sachant très bien ou cela va les amener. Un jeunesse singeant la naïveté, jouant le rôle que l’on attend aujourd’hui de la jeunesse, une jeunesse qui prend cyniquement la pose, se contentant du chaos, n’éprouvant: ni crainte face à la mort, ni émotions, vidée de toute humanité. Après 30 ans d’autoritarisme consumériste c’est angoissant finalement.

1 commentaire:

  1. Bel article. Absolument d'accord avec toi sur l'absence de surprises, et sur le lien avec Bret Easton Ellis.
    Pas tout à fait d'accord par contre, sur le cynisme de la jeunesse XXIe siècle. Il me semble que ce qui ne fonctionne pas dans "Kaboom", c'est que Araki décrit une jeunesse dont les comportements sentimentaux et sexuels (bisexualité, triolisme, etc.) sont plus ou moins devenus la norme, en tout cas beaucoup mieux acceptés socialement que dans les années 90 (à ce titre, les entretiens avec les jeunes acteurs sont éclairants). Ce qui expliquerait l'absence de confrontation entre cette jeunesse et le monde, une violence, due à des comportements jugés "anomaux", qui faisait toute la force de la trilogie (la fin traumatisante de "Doom Genaration", par exemple). Aujourd'hui, les adolescents d'Araki ne sont plus confrontés à aucune violence, à aucun rejet: du coup, le film n'a plus d'enjeu, et le romantisme intrinsèque de son cinéma n'est plus une provocation, il devient attendu; c'est peut-être pour cela que tu parles de pose et de cynisme.

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